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La Mousson d’été 23 | Temporairement Contemporain [n°2]

troisième jour

samedi 26 août 2023


Billet • La Balaguère

« ou c’est une ancienne usine, ça pourrait aussi être une sorte de théâtre, est-ce que quelqu’un vit ici, tu penses, personne ne peut vraiment vivre ici, tu as vu les murs, le plafond, tout est comme dans un film »
Roland Schimmelpfennig, Le cercle autour du soleil

On dirait que la Mousson battrait son plein, on commencerait par fendre les lacs, hurler qu’on n’est pas ce que les autres disent de nous — on affronterait dans sa voix le cri des loups et le vent sous les marronniers pour finir en peuple neuf le sang fouetté par la colère, le désir d’ailleurs, mais non : tout continuerait, on se retrouverait alors tout dressé de solitude face à une autre en périphérie d’une ville qui ne se bâtirait qu’à force de destruction — on parlerait par-dessus les bruits des marteaux piqueurs, les usines s’effondreraient les unes après les autres, le bruit s’approcherait, il faudrait partir et on resterait là à se dire ce qu’il est impossible de s’avouer et tout finirait encore dans les rafales de vent et cette fois aussi de mitraillettes, on se relèverait malgré tout quelque part entre Valparaiso et Santiago emporté par une diligence conduite par un homme dont le visage traversé par une barre de fer laisserait voir le ciel, l’existence libérée de ses entraves, les dieux vaincus, le théâtre tout entier par où de nouveau on sortirait épuisé et prêt à en découdre avec la réalité : on dirait que c’était le soir et qu’un autre matin nous attendrait de l’autre côté.


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