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nuit semaine mois : prêts à vivre

lundi 25 juillet 2016

De retour, mais d’où ; et vers quoi ? Rideau sur Avignon : Marseille semble abandonnée. D’une rue à l’autre, personne. La chaleur qui monte n’appartient qu’à l’entre-deux sans raison d’une pliure : au pli de l’année, ces mois de juillet et d’août ralentis par la chaleur, et il faut passer au-dessus de ces jours aussi.

Garder la haine des bilans comme antidote : pas de regard arrière. Et pourtant, reviennent par flux ces trois semaines passés. Sur scène, ces clins d’œil à l’actualité qui tiennent lieu « d’inquiétude politique », quand souvent c’était surtout pour l’éconduire qu’on la convoquait comme pure image. Reste, toujours, des restes du monde en travers de la gorge : qui ne passe pas.

Dans les journaux, les polémiques commencent toujours par la phrase : "je ne veux pas faire de polémiques, mais". Oui, on crève sans doute de conflits qui se taisent. On crève de ce monde vieux qui s’effondre à force de vouloir se préserver de lui-même.

À la radio, à l’instant, cette phrase : "on a tous cette tendance naturelle à réagir comme un ministre l’intérieur, c’est normal".

Est-ce qu’il faut accepter, ou défendre, ce monde qui considère que réagir comme un ministre de l’intérieur est une tendance naturelle ? Est-ce qu’il faut vouloir appartenir à ce réel ? Oui, évidemment : on est une part de ce monde, une part de ce présent dans la mesure aussi où on la récuse absolument : comme on récuse ces hommes qui parlent en notre nom en nous attribuant les tendances naturelles les plus abjectes et les tâches les plus contraires à ce que nous sommes.

Ce que nous sommes, nous l’ignorons, évidemment.

Nuis, jours, semaines : nous sommes prêts à vivre – c’est écrit sur la ville.

Pendant que le temps passe, passent les nouvelles du passé. L’Europe rejetée ici, défendue là : « ça et la guerre ». La guerre qui est partout dans les rues et fait de nous, non plus des hommes et des femmes, mais des civils. Entre ces nouvelles et ce passé, on fraie dans la pliure des mois.

Nuits, jours, semaines, on est la ponctuation du temps. Et plus que jamais, après cet Avignon, après ces mois, après ces jours et ces nuits, nous sommes ceux qui refuserons les trônes des rois et qui partent à la recherche de nouveaux royaumes, ceux qui n’existent pas encore. Nous sommes ceux qui désertent et trahissent et s’échappent infiniment pour rejoindre cet envers du monde qui saura le conjurer.


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