arnaud maïsetti | carnets

Accueil > FICTIONS DU MONDE | RÉCITS > La ville écrite > La ville écrite | La République

La ville écrite | La République

mardi 21 novembre 2017

Il faut longtemps plisser les yeux, comme devant le soleil jusqu’à l’éblouissement, ou face à la nuit pour s’habituer aux ombres, à l’invisible, aux terreurs, peu à peu l’image se fait, le point au milieu des fracas, la note perdue dans le vacarme insiste, il suffit simplement de poser les yeux sur l’image comme on pose sa cigarette, laisser venir à soi les mots, les lettres l’une après l’autre, comme les étoiles, il en vient toujours une, après l’autre, après l’autre : et peu à peu, oui, l’évidence se fait qui va nommer l’état d’évidence de ce monde-là, le sinistre de l’époque qu’à coups de ratures on voudrait faire passer – on en souligne simplement la plus grande cruauté, l’invisibilité qui s’obtient non par le silence ou le retrait, mais par la balafre, par davantage de visibilité encore, par la cicatrice sur la plaie qui ne fait que l’agrandir, par des cris là où la parole voudrait nommer : mais peu à peu, c’est la tâche du temps, se nomme le nom d’un mot digne d’avoir été déposé sous un tunnel perdu entre ici et demain : LA RÉPUBLIQUE, dit le mot que recouvre terriblement d’autres mots qui n’en sont pas, mais des ratures de mots comme des blessures politiques sur la réalité, NOUS LAISSE MOURIR.