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Heiner Müller | « Penser est fondamentalement coupable »

Fautes d’impression

lundi 3 janvier 2022


L’ouvrage n’existe plus, il n’est plus réimprimé. Fautes d’impression rassemblait des notes et des entretiens d’Heiner Müller. Parmi ces textes, choisis par Jean Jourdheuil, celui-ci : Penser est fondamentalement coupable</i.> https://www.arche-editeur.com/livre/fautes-dimpression-274], un autre recueil d’entretien est paru, en 2019, aux éditions de Minuit, mais sans ce texte. Quelques pensées, en éclaireurs, arrachées ici.


« La révolution communiste, abstraction faite des représentations millénaristes de ses débuts, a été la tentative du grand arrêt. (...) Les révolutions n’ont jamais été des forces d’accélération mais la tentative de retenir le temps. »

« On était complètement obsédé par l’idée de dépasser le capitalisme et on a oublié qu’on avait comme programme d’être l’alternative au capitalisme »

« Le rideau de fer était un mur du temps. Du fait de son existence, le problème du temps était lié à la géographie. Maintenant, ce lien n’existe plus et l’homme est livré sans défense au monde des machines. Tout ce qu’il peut espérer, au milieu de ces machines qui se multiplient à l’infini, c’est de trouver encore un lieu à soi. »

« L’homme est un facteur de perturbation. C’est pourquoi, à un moment ou un autre, il doit disparaître, si l’on ne parvient pas à le mécaniser totalement et par là à le vider de ses besoins et qualités propres (…). L’homme est l’ennemi de la machine ; pour tout système ordonné, il est le facteur de perturbation. Il est désordonné, il salit et ne fonctionne pas. Donc il faut qu’il s’en aille, et c’est le travail du capitalisme – de la structure de la machine. »

« Toute tentative d’accélération totale rencontre dans les minorités son principal adversaire. Car les minorités représentent toujours quelque chose d’autonome ; elles sont un obstacle à l’accélération. Les minorités sont des freins. De là naît le besoin de les anéantir car elles persistent dans leur vitesse propre »

« Du point de vue de la structure capitaliste, la fourmi est l’homme idéal. L’homme est un facteur de perturbation. »

« Le capitalisme n’offre jamais la solitude mais toujours seulement la mise en commun. L’offre capitaliste repose sur l’angoisse de la solitude. McDonald est l’offre absolue de la collectivité. On est assis partout dans le monde dans le même local ; on bouffe la même merde et tous sont contents. Car chez McDonald ils sont un collectif. Même les visages dans les restaurants McDonald deviennent de plus en plus semblables. »

« Devant votre miroir, le communisme ne vous donne rien. L’individu est réduit à son existence propre. Le capitalisme peut toujours vous donner quelque chose, dans la mesure où il éloigne les gens d’eux-mêmes. Sous le capitalisme, le plus grand nombre ne peut survivre qu’en tant qu’objet ».