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« Regard perdu » | Échap

jeudi 18 mars 2010


Ce 25 mars sortira l’ouvrage collectif Echap, fruit du travail des étudiants en Master 2 Édition de l’université Paris IV-Sorbonne. Suis fier d’y avoir pu contribuer, vus l’ardeur et l’enthousiasme que ces étudiants ont mis dans la réalisation de ce livre qu’ils ont imaginé, puis élaboré et réalisé ; livre qui s’accompagne d’un site, autonome et complémentaire.

Oui, c’est une grande joie d’avoir pu à ma mesure participer à ce beau projet, et c’est un signe d’importance de voir l’université le porter : l’édition numérique comme autre mode d’existence du livre, et le livre imprimé comme forme possible (mais non achevée ou totale) du texte. Et on peut saluer l’initiative de ces enseignants, entourés d’acteurs majeurs de l’édition imprimée et numérique.

Dès aujourd’hui, on peut consulter sur le site Echap (réalisé entièrement par les étudiants), des vidéos, des montages sonores ou photographiques qui donnent au projet une épaisseur et un sens qui déploie le texte imprimé plus qu’il ne le commente ou le promotionne. C’est une belle leçon que ces futurs éditeurs nous donne.

En décembre, je reçois la description de ce projet : suis invité à écrire à partir d’une image qui, d’emblée, me questionne — non pas tant comme thème, fragment d’un récit à combler, figure partielle de ce récit, mais qui s’impose d’elle-même en image du geste d’écrire pour moi. Le regard de cette femme portée par-delà, et on ne saisit de ce qui passe sous ses yeux seulement ce qu’on en voit dans son regard. Suis resté, oui, captif de ce regard et de son évidence : alors, l’écrire, en retour, le fouiller. Essayer d’en déceler le signe : et comment l’écriture pourrait le reconfigurer comme image même de l’acte d’écrire.

©Wayne Wu / Chambre(s) d’Hôtel – Collectif t.r.a.n.s.i.t.s.c.a.p.e

Le texte s’appelle "Regard perdu", et on peut lire des extraits, avec quelques photographies miennes, sur le site de Echap.

Le travail effectué ensuite avec l’une des étudiantes/éditrices, Marie-Laure Nolet (qui a également réalisé le très beau montage photographique en ligne), a été riche — son attention au détail, son exigence, sa générosité surtout, le parti-pris du texte contre le reste enfin, a été une belle expérience : et j’ai eu l’impression, moi aussi, d’apprendre de la construction d’un livre, quand bien même je n’en aurais écrit que quelques pages et serais resté en-deçà de son élaboration. Grand merci à elle pour l’accompagnement.


Présentation du projet

L’image, c’est ce que l’on voit immédiatement, cette femme un peu de traviole et intrigante. Là, derrière la vitre, les deux bras levés, le regard perdu au loin qui nous dépasse et nous ignore. Une photographie en noir et blanc. Tout part d’elle : les ruelles du Quartier Rouge, une héroïne de Bergman, 455 feuilles superposées et découpées, des voix qui résonnent, un sousmarin, des escarpins rouges, un père qui part, un frère qui s’en revient, un moule à kouglof, de l’humour parfois, des abîmes souvent, elle a tout vu, tout vécu, surtout l’ inattendu. Trente-huit artistes et écrivains, issus de blogs, de revues, d’écoles d’art ou encore de la photographie, ont relevé le défi lancé par quatorze jeunes éditeurs : dire ce que l’image ne montre pas, s’en éloigner pour mieux la dévoiler. Des portraits qui se déploient comme autant d’histoires à lire, à regarder ou à entendre sur des pages papier et numériques.

Échap, c’ est suivre le regard de cette femme et sortir de l’image, s’échapper du papier, penser le numérique à travers l’ association d’un livre et d’un site, tourner la page pour lire autrement.

Avec la participation de :
Mathieu Adamski, Laurie Agusti, Barbara Albeck, Sarah Bastin, Céline Bernard, Daniel Bourrion, Hugo Breant, Laurie Boulard, Michel Brosseau, Sylvain Coher, Philippe De Jonckheere, Léo Delafontaine, Chloé Denamur, Nathalie Derimay, Blandine Douaillier, Renée Doumergue, Mélanie Jourdan, Jean-Yves Fick, Julien-Noël Hay, Ronan Kouril, Pierre Lefrançois, Arnaud Maïsetti, Many Airs, Eric Marciano, Johanna Mathias, Zoé Maussang, Alena Meas, Amélie Moglia, Valérie Mréjen, Grégory Noirot, Romain Revert, Myriam Rubis, Richard Negre, Kieran Pavel, Lucien Suel, Anne-Marie Thouron, Tim, Béatrice Veillon
Postface de François Bon

À l’origine était une photo. Celle d’une femme de guingois derrière une vitre, les mains levées, posées à plat, le regard tourné vers l’extérieur qui invite à penser ce qui se trouve autour, ce qui se trouve devant, derrière, à côté, avant et après. Avec elle tout a commencé. L’idée : penser le hors-champ de cette photographie, imaginer, les yeux fermés, ce que cette femme a pu vivre, voir ou faire. Trente-huit artistes, écrivains, photographes, dessinateurs, graphistes, venus du papier et du numérique, ont eu carte blanche pour raconter ce qu’elle leur inspirait et écrire son histoire. Seule consigne : s’en échapper pour mieux créer.

La tâche nous revenait en tant qu’apprentis éditeurs du master 2 édition de la Sorbonne d’encadrer ces sorties du cadre, ces inventions du hors-champ. Sur le papier, nous l’avons rendu visible par ce centre blanc, omniprésent, qui renvoie les textes vers les marges. Choix délibéré pour repenser la mise en page des textes, il insiste sur l’absence de la photographie, sur la nécessité de s’en détacher.

Pour aller plus loin, s’éloigner des marges du papier, c’est par le numérique que le hors-champ du projet s’est affirmé. Le site que nous avons conçu n’est pas seulement une plateforme de lecture, il est un lieu où de nouvelles formes de création sont à voir, à animer et à écouter. Il permet de s’échapper du texte pour inventer des liens entre vous, lecteurs, et les auteurs de ce projet.

Va-et-vient entre les caractères et le clavier, entre les pages et l’écran, projet qui se veut en adéquation avec les possibilités du papier et celles du numérique, Échap est à la fois cette touche d’ordinateur qui permet de sortir d’une fenêtre, ce livre papier que vous tenez entre vos mains, un site internet et l’histoire d’une femme racontée quarante-et-une fois, de façon différente, malmenée, déchirée, filmée, transformée.
C’est maintenant à vous d’aller voir plus loin.