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Cat Power | Black
Noir
dimanche 20 mars 2022
Ange plein de santé, connaissez-vous les Fièvres, demandait, inquiet, et goguenard, et terrible, Baudelaire, oui : Ange plein de santé, connaissez-vous les Fièvres, / Qui, le long des grands murs de l’hospice blafard, ajoutait-il, cette fois avec le regard perdu, disant encore, Comme des exilés, s’en vont d’un pied traînard, / Cherchant le soleil rare et remuant les lèvres ? et Baudelaire achevait, dans la boucle folle que dit ce qui seul accomplit l’Éternel retour (la mort) : Ange plein de santé, connaissez-vous les Fièvres ?
C’est Yannick Haenel qui le prétend : et si c’est vrai, si Cat Power est véritablement la plus baudelairienne des poètes de notre temps, alors il faut l’entendre, dans la douceur intraitable de sa voix, l’appel aux démons, et dans ses murmures enfiévrées, la même fatalité sereine teintée de défi, cette alliage de vanité et de rage : et sous la couleur noire cette pâleur, pour que dans la pâleur on perçoive le dernier souffle, celui qui cherche son second souffle.
Charlyn Marie « Chan » Marshall, dite Cat Power, née quelque part à la fin du siècle, survivante de tout ce que le monde a fait de nous, susurre les mots arrachés au moyen-âge français pour nommer ce qu’on ne peut pas nommer — et quand elle dit La Grande Faucheuse avec l’accent d’Atlanta, Géorgie, elle parle de l’autre côté de la langue où la langue fraie parmi les démons, les anges.
Et si c’est tout le Moyen-Âge qui vient à elle, et l’année 1348 qui le contient entièrement, c’est aussi tout ce qui le cerne : ce que la mort fait à la vie, on ne le saura jamais ; on est, vivant, ignorant de ce qui fait pourtant la plénitude de l’existence, cette mort : seule promesse qui sera tenue.
Cat Power chante cela tranquillement, défaite pourtant, emportée par le rythme de fauche que la ballade imprime au mouvement qui de droite à gauche, tout à la fois emporte, cisaille et avance.
Laissez moi vous raconter l’histoire, dit la conteuse, mais on ne sait bientôt plus qui raconte : et on comprend peu à peu que la conteuse était aussi bien la mort elle-même que ce qui lutte contre elle.
On n’a jamais trouvé de mot, nulle part dans aucune langue, pour dire le contraire de la consolation : il était pourtant là sous nos yeux, c’était celui de littérature.
La Grande Faucheuse / La Grande Faucheuse / La Grande Faucheuse
The one memory and the one who threw it right back
He was down, so I took a ride / He moved the westway out of there
So I took his advice / Oh, two seconds flat
If I’d have know he woulda treated me like that
He had an empty gaze / In his eyes, like a bear
Took me firmly / I threw the coat away just like a foxy set
Who was a good kid when God was lookin’ after ya ?
Wow oh, who’ll make it through ?
How was I to know, he woulda done this to you ?
I would take and he would turn and / Wait, let me catch my breath
That’s black if you can catch him with it / I was someone who believed in sin
He said, I think I know just who that is
Who was a good kid when God was lookin’ after ya ?
Whoa oh, who’ll make it through ?
How was I to know, he woulda done this to you ?
Threw me in the bath, with ice and a slab / Can of coke, down my throat
Almost his whole hand went in / First I was amused, closest to death I’d ever been
If I knew, I would tell ya / To keep trouble off, I tell ya
You’re the next one to get / Left with this story, that’s when you go mad
Who’ll be a good kid now that I’m lookin’ after ya ?
Whoa oh, who’ll make it through ?
How was I to know, black would turn from me to you ?
Angel of Death / Angel of Death / Angel of Death
Angel of Death / Angel of Death