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La Ville écrite | Le Paradis
« Ensemble pour un avenir de qualité »
mardi 7 novembre 2023
Adam et Ève laissèrent tomber quelques naturelles larmes qu’ils essuyèrent vite. Le monde entier était devant eux, pour y choisir le lieu de leur repos, et la Providence était leur guide. Mais main en main, à pas incertains et lents, ils prirent à travers Éden leur chemin solitaire.
John Milton, Le Paradis Perdu [1664] (trad. Chateaubriand), derniers vers du poème héroïque
Combien d’étages pour l’Au-delà ? Au bout du couloir, l’ascenseur ne serait jamais en panne ; il conduirait aux appartements aménagés avec soin pour l’éternité des heures d’ennui. De là haut, la vue imprenable sur le vide : ne pas se pencher.
Les plantes d’intérieur ne mourraient que pour être remplacées, les résidents ne descendraient plus que pour promener leurs chiens au bout de leurs laisses en or et argent. Le Paradis était donc devenu une résidence pas même cossu d’un arrondissement privilégié d’une grande ville du sud ; les promesses ne seraient donc jamais tenues.
On avait remplacé les deux Anges intraitables armés d’épées de feu par un digicode qui changeait tous les deux mois ; on y interdisait le colportage et le bruit excessif. On attendait la mort et elle ne venait pas, ou seulement dans les rêves, dans les souvenirs qu’on prenait pour des rêves, et dans les cris qu’on entendait au loin, mais où ?