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« La surface des choses »

lundi 2 février 2015

Texte écrit à l’invitation de Pierre Ménard pour Publie.net : projet autour de la nouvelle de Brautigan sur ces lendemains de fête :

Ouvrage disponible sur le site de l’éditeur, publie.net

Présentation de l’éditeur :

Gaétane Laurent-Darbon a lancé l’année dernière une série photographique autour des sapins de Noël abandonnés dans la rue, Our 390 Christmas Trees , publiée sous forme d’album sur Facebook à laquelle une quarantaine de personnes ont participé en envoyant leurs clichés, série qui faisait référence à la nouvelle Qu’est ce que tu vas faire de 390 photos d’arbres de Noël ? écrite en 1964 par Richard Brautigan, dans son recueil Tokyo Montana Express . Nous avons décidé de lancer cette année un projet éditorial avec un collectif d’auteurs (François Bon, Mathieu Brosseau, Mitch Cullin, Jean-Marc Flahaut, Arnaud Maïsetti, Pierre Ménard, Eric Pessan, Thomas B. Reverdy, Joachim Séné, Pascal Simon, Lucien Suel, et Thomas Vinau) sous la forme d’un recueil de textes et de photographies, Lendemains de fête, diffusé sur Publie.net autour du texte et du thème de la nouvelle de Richard Brautigan. Un site, sur lequel de nombreux photographes ont envoyé leurs photographies de sapins trouvés dans la rue, accompagne ce projet : http://sapins.tumblr.com.


vers le sud, c’est peut-être parce que la mer touche la ville, ou que le vent est fort quand le ciel est haut, ou que la lumière rase parfois les basiliques d’or et que Noël est un conte seulement pour ceux qui savent la couleur de la neige et le froid jusqu’au dedans des os, et j’étais pourtant armé, l’appareil photo avec moicomme chaque année à Paris où janvier suivait décembre avec ces cadavres d’arbres sur les trottoirs et le deuil de l’année à consoler en soi, mais, ici, une rue après l’autre autour de Castellane, et une semaine après l’autre dans ce janvier âpre des violences en temps réel des journaux d’informations continues,rien,à part, parfois, un peu de terre, iciet là,dans l’ascenseur de l’immeuble,ou près du local à poubelles,mais rien des arbres d’autrefois qui à Paris sont partout mourants,rien sur les trottoirs, ici,que parfois des hommes et parfois sans gants et sans chaussures,rien ici des arbres de décembre,il fallait s’y attendre, et il faut maintenant s’y résoudre,et continuer à regarder les hommes qui seuls dorment dans la rue,et à apprendre de la terre quand elle est invisible, sous le béton des villes,et la surface des choses, décembre comme le membre amputé de janvier, qui démange, et pourtant aller.