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Jrnl | Aux heures d’amertume
[27•07•23]
jeudi 27 juillet 2023
Moins haut, sont des égouts. Aux côtés, rien que l’épaisseur du globe. Peut-être des gouffres d’azur, des puits de feu. C’est peut-être sur ces plans que se rencontrent lunes et comètes, mers et fables. Aux heures d’amertume je m’imagine des boules de saphir, de métal. Je suis maître du silence. Pourquoi une apparence de soupirail blêmirait-elle au coin de la voûte ?
Rimb., « Enfance », V (Illuminations, 1875)
Par la fenêtre, le vent donne la leçon ; il n’y a rien devant lui alors il passe comme s’il était du temps, de la mer, rien : il ne s’éloigne pas, il ne s’approche de rien, il traverse le cadre de la fenêtre sans effort — des arbres témoignent là-bas que quelque chose a lieu : il y a plutôt, autour de moi, les nouvelles ouvertes sur l’écran, comme le monde éventré et les entrailles répandues sur le sol diraient toutes les formes de dégoût, les crimes commis au nom de l’ordre, les incendies qui ravagent, les insultes du pouvoir, tout qui donnerait encore envie de se réfugier loin — le vent attise le feu et disperse les cendres, ramènent les odeurs et les chasse : si salubre est le vent, il donne des nouvelles de la pourriture de ce monde — comment va-t-il ? Il s’en vient, qu’il s’en aille.
Lire les quelques mois d’hiver 1525 qui vont m’occuper toute l’année à venir me fait apprendre que le mot sabotage vient du bruit des sabots sur le sol qui annonce la colère paysanne, le « ça suffit » des mains ouvrières, la dignité de marcher cette fois d’un même pas et de ne pas se laisser écraser par la chaussure bourgeoise : on marchait longuement de village en village pour chercher un peintre qui saurait dessiner sur les étendards le sabot qui servirait de signe de ralliement, parfois les contours d’un fou suffiraient, parfois, on tracerait des formes plus secrètes encore, une faucille, le souffle du vent, que sais-je : tout pourrait servir à faire entendre le sabot.
Cette fois, je ne ratais pas le train, j’y montais au moment où il quittait la gare, sauf qu’il partait dans l’autre sens : le rêve s’affolait alors, je voyais disparaître le paysage, les voitures du train devenaient peu à peu vides, il ne restait plus que moi dans ce train qui s’enfonçait quelque part en moi, mais où, où, demandais-je en hurlant au contrôleur qui me souriait et gardait le silence.