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jusqu’où la mer échoue

vendredi 25 septembre 2015



La mer ne se retire pas, ici. Elle ne vient pas non plus. Quand elle bat, c’est sur elle-même. Leçon qu’il faut prendre. Dans les insomnies, penser à la mer réveille. Penser au ciel aussi, comme penser à tout ce qui s’échappe de soi entre la mer et le ciel.

Tout réveille, et il faut garder la veille comme le sommeil : à poings fermés, comme une colère contre soi. Journal intérieur de ces nuits tenu en silence.

Reprendre la clarinette. Apprendre à écouter de nouveau son propre souffle. Percevoir que le corps échappe, mais qu’il a des souvenirs encore, les doigts trouvent seuls parfois le chemin. Recommencer à zéro, mais pas tout à fait. Une leçon aussi, de ces jours. Recommencer. Un verbe impossible : si on commence, c’est de zéro. Recommencer, mais derrière quoi ?

On me dit, clarinette en main, pense qu’il y a toujours une phrase qui te précède quand tu commences la première note. Pense qu’il faut souffler pour prolonger cette phrase. Leçon aussi.

Tout recommencer. C’était devant l’écran, ce que je m’étais dit, il y a dix jours. La barre sur la page clignote comme des néons dans les villes lointaines, au milieu de la nuit. On ne sait si la lumière va s’éteindre, ou si elle ne cesse de s’allumer. Il fallait recommencer, reprendre.

Pense qu’il y a une phrase qui te précède, et que tu la prolonges, pense qu’il y a une phrase qui est devant toi, et que tu vas rejoindre.

Pointe Rouge, cette image. Entre soi et la mer, ce mur de brique. On ne sait pas s’il sépare ou rend possible la jonction. L’enjamber permet de se tenir dans ce lieu qui n’appartient ni à la ville ni à la mer. La route vient s’échouer là où les vagues échouent. Dans cet échec, plonger les mains, les bras, le corps, respirer sous l’eau, chercher la surface, tendre les mains vers la profondeur du ciel, ne pas la trouver, et soudain

sentir au poignet sa main qui doucement me serre et me