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les germes de la clarté
vendredi 19 février 2021
Pendant la nuit qui précéda mon travail*, je m’étais cru transporté dans une planète obscure où se débattaient les premiers germes de la création […] ; cependant, à mesure que ces créations se formaient, une étoile plus lumineuse y puisait les germes de la clarté.
Nerval, Aurélia (Les anciennes races)
Se dire : Rimbaud aura été contemporain de la prise de pouvoir de Lobengula au Matabélé, de la Proclamation de la Grande Doctrine faisant du shintô la religion d’État au Japon, et des derniers massacres des Premières Nations des Grandes Plaines. Se dire : le dictionnaire Français-Huron s’est écrit avant que Furetière ne compose le sien. Se dire : la terre n’est ronde que pour ceux qui ne l’habitent pas. Se dire : il n’y a pas de fin possible à la terre tant qu’on la marche. Se dire enfin : le jour où je fermerai les yeux pour toujours existe déjà sur le calendrier.
Sur cette vidéo envoyée depuis Mars, ce qui bouleverse surtout, ce n’est pas l’image d’une terre fumante, hostile, méchante, non : c’est le bruit du vent qui court en liberté. On regrette de ne pas trouver de vie : mais elle est là, dansante et tourbillonnante, invisible.
C’est l’autre image de ce jour : l’éclatement joyeux de l’Etna. Je regarde longtemps. Il faudrait là encore tirer la leçon et il n’y en a pas. Il n’y a qu’un mouvement qui paraît s’épuiser à mesure qu’il se dresse. Il n’y a que de la mort qui ne sait se produire que dans la vitalité la plus insolente. Il n’y a que nous de l’autre côté de l’image, préservés du feu, de la mort, de sa vie. Il n’y a que du silence aussi tant manque le tonnerre du volcan. Il n’y a rien.