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vies de la Sibylle de Panzoust
lundi 6 septembre 2010
Red Dawn Rising (Birdy Nam Nam, ’Manual for Successful Rioting’, 2009)
Entendez ma conception : On m’a dict que à Panzoust près le Croulay, est une Sibylle tresinsigne, laquelle praedict toutes choses futures : prenez Epistemon de compaignie, & vous transportez devers elle, & oyez de ce que vous dira.
François Rabelais, Le Tiers-Livre
Traque le matin quand il se dérobe ; pas de petit profit, on prendra ce qu’il faut — éventrer le moment où le jour décline (tâcher de trouver le ventre de cela) : s’en aller comme des voleurs, et avec soi le déluge, le chiffre du jour à venir, les prophéties.
Suis passé en voiture, hier, devant Panzoult, en face de L’Île-Bouchard : n’imaginais pas que ça existait pour de vrai : on ne s’est pas arrêté, et tant pis — mais aurais eu bien des choses à demander à la Sibylle, qui doit y être encore.
Sans Sibylle, sans marc de café, j’essaie de deviner mon avenir proche aux lignes sur la main, mais elles s’arrêtent toujours au bout de la paume — ne prédit que la seconde qui vient (la prédiction est toujours celle-là : que la prédiction va finir quand la ligne de la main atteindra la fin de la paume). Alors, suis perdu, n’ai que le présent face à moi déroulé jusqu’à la fin.
Pourtant, quand je suis sorti le soir, dans cette campagne, la nuit était si noire qu’on pouvait voir le ciel — ne suis pas habitué. Dans nos villes, les lumières des immeubles enveloppent tout d’une sorte de halo protecteur. Ici, non. Le ciel se tenait bien haut et lisible. Je voyais les nuages, je pouvais les déchiffrer. Cerner ce qui va m’arriver. Évidemment, les nuages ont vite pris la forme de la Sibylle de Panzoust.