La Mousson d’été 23 | Temporairement Contemporain [n°0]

Billet • Balanguère

D’une armure de samouraï à une robe à la française en trois pièces et pékin de soie dit mexicaine à rayures orange corail, fleuries roses et vertes disposées sur fond crème, les temps ont bien changé. Les sabres ont été remplacés par les mocassins et les masques guerriers des yakuzas furieux par la plus fine des dentelles fin de siècle. La Galerie du Soleil nous accueille cette an- née sous des auspices en apparence moins brutaux que l’an dernier : « Collectionner la mode », telle est l’exposition qui orne désormais les murs de l’Abbaye. Comme chaque année, en bons spectateurs de théâtre rompus à l’art de la lecture paranoïaque des signes, nous en cher- chons le sens. On voudrait tirer le fil. On sait bien que le monde est un théâtre, que les salons mondains du XVIIIe valaient bien une scène, que ces robes sont des costumes comme on n’ose l’imaginer sur un plateau. On sait aussi la vanité de ce décorum. Et que la peau aussi est un costume qui vaut peut-être mieux que les robes de la Comtesse du Bary ou de la famille Beau- harnais. Alors on regarde ces costumes qui n’en sont pas et on s’éloigne, songeant à ce qui fait théâtre d’une parole nue, d’un corps de mots mieux ciselés que de la dentelle et d’une présence faite de nous-mêmes, « étoffes dont les rêves sont faits ».