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William Blake | Chants d’Innocence & d’Expérience, le projet
dimanche 9 juin 2013
William Blake.
Le seul livre que j’avais acheté à Londres, adolescent, je me souviens de la librairie. J’avais cherché longtemps, le livre on ne le trouvait pas en France - pas celui-là, avec les gravures. Je l’avais lu dans le train, et souvent ensuite.
C’est un livre que je possède, comme on possède le goût du soir, de cette lumière. Je n’ai que ce livre, je sais qu’il en existe beaucoup désormais, dans de nombreuses éditions, et je l’ai beaucoup lus, dans des dizaines de versions : en bibliothèque, c’est souvent que je vais au rayon littéraiure anglaise seulement pour lire Blake, et les essais de langue sur un mot (par exemple, ce titre : faut-il traduire par Chants, pour l’écho avec Dante, dont Blake préparait une version illustrée au moment de sa mort ; ou Chansons, pour dire la légèreté (d’apparence), la musicalité d’évidence, les nombreuses références au poète chanteur, musicien, joueur de flûte (l’ouverture si magnifique de simplicité) ?).
Moi qui parle si peu la langue, je ne fréquente vraiment que les traducteurs dont je connais le travail – je sais alors que je lis deux langues, et cela me console de mon ignorance, du regret de ne pas lire l’auteur dans sa langue propre.
Mais William Blake, je peux lire. Ce n’est pas à cause de la simplicité du vocabulaire, mais vient peut-être de sa reprise, incessante, et du rythme qui engendre les images. Et des déplacements sur quelques mots à partir d’une racine, qui en fait pour moi un alphabet en même temps qu’une langue de poète singulière et unique.
William Blake, je reviendrai sans doute dans les carnets de ma traduction sur l’homme, fascinant – et tout aussi fascinante la légende de l’homme construite après sa mort et qui continue encore de façonner l’idée qu’on s’en fait. Si je me tourne vers lui, j’ai mes raisons, et surtout ces jours, c’est aussi parce que de le joie noire qui le porte, il a connu toutes les nuances, et du chemin de dépouillement, toutes les errances, toutes les puissances.
Chants d’innocence et d’expérience – ce sont deux textes, le premier composé en 1789, est pratiquement son premier recueil ; le deuxième sera publié en 1794 après plusieurs autres ouvrages qu’il illustrait lui-même. De part et d’autre, la Révolution française. C’est à dire la trajectoire d’un espoir immense à la mélancolie infinie. L’ensemble du recueil est sous-titré :
Les deux textes sont tout entier leur auteur, les seuls peut-être où il se livre ainsi ; le mot livrer – pour un imprimeur / éditeur – n’est pas rien.
C’est que W. Blake, trop pauvre pour faire éditer son œuvre auprès des imprimeurs de Londres, se fit éditeur lui-même : un exemple aujourd’hui. L’œuvre est ainsi signé :
Le texte n’est donc qu’une partie infime du poème. J’essaierai autant que possible de reproduire les illustrations et les gravures. Mais c’est dans la langue surtout que je chercherai William Blake – là où il va puiser dans les thèmes de la pastorale, ce qui va ensuite recomposer le champ littéraire, le romantisme noir, et la conquête de territoire de folie, de terreur.
Là que j’essaierai de l’approcher.