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Marseille | les docks, façade ville
mercredi 18 mars 2015
Les Docks, à Marseille, surgissent maintenant comme un nouveau quartier — de l’autre côté du boulevard, les immeubles de verre, des bureaux dont les lumières s’allument encore la nuit, sans doute pour faire fuir. Mais personne ne passe ici. À l’opposé, derrière, c’est la mer : on ne la voit pas. Entre, ces bâtisses régulières de pierre, anguleuses aux fenêtres si nombreuses qu’on ne les compte pas, des étages jusqu’au ciel sans doute pour mieux voir l’horizon les navires qui arrivent, les cargaisons à déposer.
Désormais, la mer est presque vide en surface et les Docks n’en sont plus. Conrad a pris le bateau ici, je l’imagine d’angoisse, lui qui a traversé tous les océans porteur de cet énigme : il n’aura jamais pu surmonter son mal de mer. Et Rimbaud évidemment, qu’on débarqua un soir de mai, le 20 ; et qui réclama jusqu’au dernier souffle de novembre qu’on traîne son corps jusque là où sont les docks et les départs ; en vain. Ce sont bientôt des commerces, des halles, des rues où aller pour perdre son temps et son argent.
Pour aller au théâtre de la Joliette-Minoterie, depuis le Métro, il faut passer par cette longue rue droite – la longer, c’est traverser le temps, depuis 1856 : 365 mètres comme autant de jours, 4 cours comme autant de saisons, 52 portes comme autant de semaines, et 7 niveaux en hauteurs, comme autant de jours dans une semaine — et pas d’ombre pour se reposer de Dieu, à cause des façades. La rue étroite. On perçoit les travaux, encore, qui s’achèvent. Et dans les premières chaleurs de l’année, le vent. Lever le visage vers le ciel, et s’arrêter à chaque fenêtre, ou presque.
C’est la mer mais côté ville, quand elle est invisible ; les vieilles façades des entrepôts qu’on rénove, façades de notre présent qui n’aurait plus rien à cacher, ni aucune promesse d’aucun départ.