Entre deux averses, cette femme qui lit. Décharge près de Nairobi, capitale de l'Afrique britannique à la fin du XIX, reconstruite après la grande peste et l'incendie en 1900, et maintenant, ville décharge de plus 150km où, entre deux averses, on s'assoit, pour lire. Ce que la jeune femme lit, je ne sais pas ; qu'est-ce qu'on lit, dans une décharge, à Nairobi, aujourd'hui ? Photographie de notre monde, celui qu'on ne sait pas, et dont nous sommes de part en part. Entre les déchets sur le sol, et le livre qu'elle tient, une si mince frontière. Peut-être qu'immédiatement après, elle jeta le livre sur le sol ; peut-être que juste une seconde avant la photographie, elle a ramassé cette chose sur le sol qui semblait un livre et que pour passer le temps, elle feuilleta quelques pages. Ou peut-être qu'elle a ramené ce livre, précieux comme un luxe qui absorbe la totalité du monde en déchet, comme ce qui permet de lui faire violence. Si on doit écrire, de l'autre côté de l'image, c'est pour les déchets évidemment, non pas pour le livre. Et au-dessus d'elle, la couleur du ciel, sous lequel on se tient aussi. 

Image : 3 avril 2012 – Micah Albert (USA), Nairobi, Kenya 

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