arnaud maïsetti | carnets

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au revers

jeudi 7 janvier 2010

Je possède au revers de moi tout ce que je ne suis pas, tout ce que la nuit en secret je confie à la part de moi la plus enfouie. Si je voulais en faire le portrait, je commencerai sans doute par dessiner les yeux avant les contours du visage, et sur les lèvres, je tracerai à la hâte, comme un enfant, des larmes de sang, noires.

Le rêve tait ces choses là : le rêve censure plus qu’il ne dévoile — alors, si je cherche à savoir ce que la part la plus enfouie de moi cherche à me dire dans les moments de plus grande solitude, de rage plus sourde encore, je vais toujours à l’opposé de ce vers quoi le rêve m’oriente. Je retourne l’image qu’elle me présente, et la regarde longuement, comme si c’était ma propre main, coupée.

C’est un long exercice. Dans la ville, je m’efforce de même : quand elle m’offre un visage, je cherche toujours dans les quartiers plus noirs, plus lointains, les centres invisibles des murs, les reflets tremblés des clochers en haut des fleuves. Sur les parois, entre les grafitis coulés jusqu’au sol, je pose ma main, sens battre aux tempes du réel les coups saccadés et irréguliers d’un pouls qui finit par se confondre avec le mien.