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Hokitika | Cœur vert de la Greywacke

Eaux de glace et ombres anciennes

dimanche 6 avril 2025


Janvier - juin 2025 : remonter le cours du monde par l’est.

— Le sommaire

 #1. Bangkok, ville furieuse
 #2. Ayutthaya & Sukhothai, ruines de ruines
 #3. Chiang Mai & Chiang Rai, vestiges du Lanna
 #4. Descendre le Mékong
 #5. Luang Prabang, d’or et de cendres
 #6. Nong Khiaw & Muang Ngoi, où va le nord Laos
 #7. Ban Phong Van, sources de l’or blanc
 #8. Xieng Maen, de l’autre côté
 #9. Kuang Si, ce qui tombe
 #10. Le Tak Bat, d’aubes en aubes
 #11. Vang Vieng, refuge de far-east
 #12. Vientiane, capitale intempestive
 #13. Les Quatre Mille Îles, et davantage de ciels
 #14. Champassak, à la lune recommencée
 #15. Phimai, perspectives futures du passé
 #16. Dans la jungle de Khao Yai, fragments sauvages
 #17. Bangkok, derniers feux
 #18. Sydney, dans les reflets, la ville dressée
 #19. De Sydney à Melbourne, la Ligne Bleue
 #20. Melbourne, ville sans promesse
 #21. De Melbourne à Adélaïde, The Great Ocean Road
 #22. Adélaïde, lenteurs et effacements
 #23. Vers la Nouvelle-Zélande, enjamber le Pacifique
 #24. Christchurch, sous le ciel renversé
 #25. Akaora, échouée à l’horizon
 #26. Taylors Mistake, sauf erreur
 #27. Hanmer Springs, la brume et l’échappée


De Hokitika, la gorge surgit, creusée dans la greywacke par les eaux vertes du Hokitika River venues des neiges du Southern Alps, les parois étranglent le ciel, les fougères, les rimu et les kahikatea sont la voûte trempée, et un piwakawaka trace ses cercles. La lumière morcelée par les frondaisons épaisses glisse sur l’eau noire et rapide, se faufile entre les ombres, se tord sur les parois lisses de la gorge : l’air humide, chargé des effluves de terre et de végétation, entre dans les poumons brutalement comme un souffle, une mémoire oubliée, et le bruit des eaux, continu et sourd, paraît ici le seul témoin de cette époque qui résiste encore, persiste là où les hommes, ceux du présent comme ceux du passé, se sont heurtés à la dureté de la roche et à l’immensité : la gorge continue de se refermer sur elle-même et de dévorer tout ce qui ose y pénétrer.

Tandis qu’ici, les chercheurs d’or ont raclé chaque galet, retourné tous les lits — ils ne savaient pas que bien avant eux, les Ngāi Tahu avaient déjà tout pris et jusqu’au dernier pounamu, verte et dure, aussi introuvable désormais que tout le reste. Les rivières, elles, continuent de serpenter, leur couleur changeant sans cesse sous les ciels, tandis que l’histoire s’étouffe dans la boue laissée par les pas des hommes dans la poussière des rêves.